samedi 21 septembre 2013


Voici le résumé météo des mois de juillet et d’août 2013.
 
Ces 2 mois d’hiver auront été plus froids que la normale.
Il a neigé 8 jours en juillet et 15 jours en août. Le thermomètre est descendu jusqu’à -33,4°C le 23 juillet et jusqu’à -32,2°C le 29 août. Il a fait froid, mais nous sommes restés loin derrière le record de froid enregistré en Terre Adélie qui est de 37,5 °C. Cette très basse température avait été observée le 4 août 1990.

Ces 2 mois ont été particulièrement venteux. En juillet on comptabilise 7 jours avec du vent supérieur à 100km/h dont 1 au-dessus des 140 km/h. La rafale maximale enregistrée ce mois de juillet est de 164,9 km/h, le 10 juillet. En août, on comptabilise 15 jours avec du vent au-dessus des 100km/h, dont 11 au-dessus des 140 km/h. Le 11 le vent a soufflé à 182,2 km/h et le 13 à 180,7 km/h.

Enfin, il y a eu au mois de juillet 12 jours avec du chasse neige et 17 jours au mois d’août. Ce phénomène,  provoqué par le vent soufflant du continent et  soulevant de la neige à son passage, s’accompagne dans la plupart des cas d’une réduction très importante de la visibilité, parfois de quelques mètres seulement.

Courbe des températures extrêmes quotidiennes enregistrées en juillet 2013.

Vents moyens et instantanés max enregistrés en juillet 2013.

Courbe des températures extrêmes quotidiennes enregistrées en août 2013.

Vents moyens et instantanés max enregistrés en août 2013.



 Samedi 31 août.

Aujourd’hui c’est moi qui suis de service sur le poste d’exploitation et de prévision. Ce samedi, j’ai ouvert la station un peu après 7 heures. Comme tous les matins, après avoir fait avoir un tour d’horizon, après avoir regardé les cartes issues des modèles  de prévisions numériques récupérées au travers de notre liaison internet, j’ai rédigé le bulletin météo tant attendu par tous.
Ce jour pourrait paraitre tout à fait ordinaire, mais il ne l’est pas pour nous. Je m’apprête à exécuter le 19500ième lâcher de ballon depuis que la station météo existe à Dumont d’Urville. Les premiers météorologistes sont arrivés ici dans les années 50. Henri  Boujon, André Prudhomme, André Lebeau furent  les premiers à sonder l’atmosphère ici en Terre Adélie. Depuis 63 ans, tous les jours, un ballon est envoyé dans l’atmosphère, mesurant tout au long de son ascension  la pression atmosphérique, la température, l’humidité, la force et la direction du vent.  

19500, ce n’est bien sûr juste rien d’autre qu’un chiffre rond mais pour l’équipe météo ce chiffre est important. Il représente des années de travail, de collecte d’informations pour l’étude et la connaissance de notre atmosphère. Pour l’occasion, certains de mes compagnons d’hivernage sont venus assister à ce lâcher. David et Angel sont arrivés bien avant l’heure afin de prendre des photos des différentes manipulations et préparations autour de la sonde et du ballon. La vedette du jour, ce n’est pas moi mais mon ballon. Par chance, le vent est calme ce matin. J’ai ouvert en grand le rideau métallique du hangar afin de faire entrer un maximum de lumière et me voici en train de « fiouler » le ballon sous les flashes des appareils photos. « Fiouler » le ballon est un terme local et inventé pour désigner un traitement à base d’un mélange de gasoil et d’huile moteur permettant au ballon de résister davantage aux températures extrêmement froides en altitude. A 15.000 mètres il fait en cette saison  environ -80 °C. Ainsi conditionné, le ballon  arrive à dépasser les 20 kilomètres d’altitude au lieu de 15 environ. Les données issues de nos sondages sont précieuses, l’Antarctique est un continent immense et le nombre de points de mesures est très faible.




Pendant que le ballon se gonfle doucement, j’explique à David à quoi sert le sondage. Si une équipe météo travaille ici depuis tant d’années c’est avant tout pour pouvoir effectuer tous les jours, à une heure bien précise, cette mesure en altitude.




La sonde est maintenant prête. Equipée d’un petit émetteur, elle va tout au long de son voyage dans les airs me transmettre les données mesurées. Solidement attachée au ballon, elle peut maintenant prendre son envol.

L’équipe météo de la TA63 est au complet. Emile et Erwan sont présents et assistent eux aussi à cet évènement.


Ca y est ! La sonde est partie. Je la regarde monter doucement. Il neige. Le plafond nuageux est bas et le ballon ne tarde pas à disparaitre. J’invite alors les spectateurs venus assister à cet évènement, ô combien exceptionnel, à venir suivre la poursuite du ballon sur mes écrans d’ordinateur et à écouter quelques informations, un peu plus techniques, sur les données reçues et qui vont être traitées.





Cet évènement fera bien sur l’objet d’un pli philatélique. Les plis sont recherchés par les collectionneurs. Je ne peux m’empêcher de penser à l’équipe qui me succédera et qui fêtera le 20.000ième lâcher de ballon en Terre Adélie, un évènement encore plus exceptionnel.